VOYAGE
en Harley-Davidson: " La Route du Bagne" écrit
par L. Blasco a été publiée par US Cycle en
France ainsi que par Cycle World aux USA.
J'ai trop écouté l'hymne biker, le fameux
" born to be wild ", j'ai pris au pied de la
lettre le folklore Harley : " Go to hell with an harley
" et autres " stay an outlaw ". J'ai
trop chantonné "si je vais en enfer ce sera sur mon terrible
engin
" . Un jour, par une sorte d'évidence ou de
logique qui nous dépasse, c'est peut être cela le destin, j'ai débarqué
ou devrais-je dire "je me suis déporté" au pays du bagne
en Guyane française avec Harley et bagages.
" J'ai fini à Cayenne ", comme disaient naguère nos anciens,
et j'ai marché à vrais dire roulé le long de la route de la transportation,
l'ex route coloniale numéro 1, avec comme terminus Saint Laurent
du Maroni, autrefois surnommé "la guillotine blanche".
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Une
Harley Springer dans la forêt équatoriale par plus
de 30° C. Le taux d'humidité avoisine les 100%... dur pour les
chromes même made in Milwaukee!Je confirme, ils résistent! |
J'ai embrassé le pas de ces hommes parfois bagnards célèbres (Dreyfus,
Seznec ou Papillon) ou anonymes, simples matricules de l'administration
pénitentiaire royale puis républicaine. La plupart n'étaient pas
des enfants de cur bien que l'on ait déporté pour un pain
volé
Je ne pense pas qu'il existe, ailleurs en France, une route qui
" transpire " toujours autant la négation de la condition
humaine. Des Hommes oubliés, rayés des tablettes de la vie par des
systèmes étatiques ont erré sur ce chemin. Oui, l'enfer a existé.
Aucun crime ne saurait excuser la sentence d'une mort läche qui
n'a pas le courage de dire son nom.
J'ai traqué leurs fantômes ; parler d'eux, c'est un peu alléger
la barbarie d'hier...La Guyane au-delà de ce passé, est depuis la
base de décollage de la fusée Ariane. C'est aussi une terre d'orpailleurs
et d'aventuriers en tous genres; à la fois " L'étoffe des héros
" et " Indiana Jones ".
Exotisme :
Aux lueurs du crépuscule, Cayenne s'éveille,
écrasée le jour par la chaleur équatoriale.
Cayenne, la noctambule, a su préserver son charme colonial : La
place des Palmistes se rythme au son des musiques afro-antillaises
(reggae, Zouk, Raggamuffin, etc.) que distillent une multitude de
baraques à frites. Une odeur d'épices et de viandes grillées s'en
échappe. Un melting pot de populations jeunes à faire pâlir la "
Grosse Pomme "(sud américains, chinois, amérindiens, créoles
et européens) y déambulent avec nonchalance.
Cette foule colorée venue de tous horizons, des grandes métropoles
du Brésil en passant par des contrées à peine échappées " des
terras incongnitas " se rue autour de la bête de Milwaukee.
A 5° de latitude Nord, la moto se résume quasi -exclusivement aux
quatre constructeurs nippons.
Je découvre, si cela était encore nécessaire, que le mythe Harley-Davidson
est vraiment universel. Les conversations fusent autour du V-Twin
de Milwaukee. Le pauvre pilote est assailli de questions. Elles
se poursuivront tard dans la nuit autour de bières brésiliennes
"assaisonnées" de quelques ti punch
Ici comme ailleurs,
il y a cette légende récurrente de caisses de Harley-Davidson WLA
abandonnées par les GI qui ont occupé la Guyane pendant la seconde
guerre mondiale. Il y aurait aussi des Electra-Glide ayant servi
au sein de la police de l'ex Guyane hollandaise, rebaptisée depuis
l'indépendance: Surinam.
J'ai mené l'enquête mais je n'ai dégotté qu'un "vulgaire 100
fonte des années 80 passablement rincé ". " Beaucoup de
bruits pour rien " aurait dit le grand William Shakespeare.
C'est le propre des mythes d'alimenter les fantasmes. Même au pays
de l'Eldorado où l'on peut payer en pépites d'or, certains traquent
la vieille dame de l'Avenue Juneau, espérant découvrir le Jack Pot
en forme de V-Twin estampillé "made in USA ". La route
Cayenne -Kourou, le long de la bande côtière, ménage une longue
ligne droite de 70 km entrecoupée de vagues courbes. La nature,
au grès de ses caprices, rythme ce parcours :Les savanes inondées
ou " pripris " succèdent aux savanes sèches. Certaines
de ces dernières rappellent quelques étendues africaines. (N'oublions
pas que la Guyane représente 1/6 de la France.)
Des zébus importés de Thaïlande y paissent en toute liberté ; Au
loin, l'horizon barré d'une ligne d'un vert tendant vers le noir,
la lisière de la forêt, nous rappellent que nous sommes en Amazonie.
Passé, les premiers émois, cette autoroute créé pour acheminer les
éléments de la fusée, permet de tester les capacités du V-Twin
à plein régime
"des clichés du Lac Salé en mémoire, position
Rollie Free et envoyez le gros gaz
L'aiguille du compteur
est à droite toute. Le miroir joue les girouettes à ce régime prohibé
il pousse bien le moteur Evolution
200 Km/h au moins ".
(...)
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